La foudre et pollution pendant la pandémie de COVID-19 AT3w

Effet de la pollution sur l’incidence de la foudre pendant la pandémie de COVID-19

La corrélation entre la pollution par les aérosols anthropiques et l’activité de la foudre est connue depuis longtemps, mais le mécanisme qui relie les deux n’a pas encore été identifié. Les mesures de confinement prises pour contenir la pandémie de COVID-19 ont été une occasion sans précédent d’explorer plus en profondeur cette relation.

Les études antérieures à 2020 sur l’effet de la pollution sur l’incidence de la foudre montrent une corrélation positive des aérosols anthropiques avec l’augmentation de l’activité de coups de foudre dans la zone1-5. La relation entre ces deux facteurs est complexe, non linéaire, et dépend de la concentration et du type d’aérosols6. D’une part, les aérosols peuvent agir comme des noyaux de condensation de nuages7, contribuant à la formation de gouttelettes, à l’électrification des nuages et à la génération de coups de foudre8. Cependant, des concentrations élevées de ces aérosols pourraient conduire à une réduction des événements de foudre en raison des effets radiatifs 9.10. De plus, l’incidence de la foudre dépend de la météo, ce qui fausse l’effet associé aux aérosols11.

Suite à la propagation des infections par le coronavirus SRAS-CoV-2, responsable de la maladie respiratoire COVID-19, l‘OMS (Organisation Mondiale de la Santé) a reconnu cette épidémie comme une pandémie en mars 2020. Plusieurs pays ont décrété le confinement afin d’assurer la distanciation sociale.

En conséquence directe des restrictions de mobilité et de l’arrêt de l’activité économique non essentielle, on a pu constater une diminution des émissions de polluants atmosphériques, notamment les particules PM2,5 (particules d’un diamètre inférieur ou égal à 2,5 micromètres) et PM10 (particules d’un diamètre compris entre 10 et 2,5 micromètres)11-16. Cette occasion unique a permis d’analyser en détail la relation entre les aérosols et l’incidence des coups de foudre en Italie11 et au Brésil12. Dans cet article, nous examinerons brièvement ces deux publications.

Activité de la foudre sur São Paulo et Belo Horizonte (Brésil)

Le 19 mars 2020, les confinements ont commencé dans plusieurs grandes villes du Brésil, comme São Paulo et Belo Horizonte. Pour cette raison, Pinto Neto et al.12 ont choisi une période d’analyse allant du 20 mars au 2 avril 2020, comparée aux données obtenues de 2015 à 2020.

Les auteurs du rapport ont constaté une réduction considérable de la pollution en 2020 par rapport aux années précédentes. À São Paulo, le pourcentage de coups de foudre nuage-sol était de 4 %, ce qui est nettement inférieur aux valeurs des autres années. Le courant de crête moyen pour la foudre négative nuage-sol était également plus faible qu’en 2018, 2016 et 2015. En revanche, dans la ville de Belo Horizonte, le pourcentage de coups de foudre nuage-sol positifs est nettement supérieur aux valeurs des années précédentes. Dans tous les cas, tous ces aspects détectés témoignent d’une forte influence de la réduction de la pollution sur les caractéristiques des coups de foudre. De plus, cette influence pourrait être différente dans chaque ville en fonction des différences de concentration des polluants.

Les résultats de la variation du pourcentage de coups de foudre nuage-sol et nuage-sol positifs de Pinto Neto et al.12 concordent avec ceux rapportés par Liu et al.17. Dans cette étude, les régions océaniques polluées et non polluées du sud de la mer de Chine ont été comparées. Comme il n’existe pas de contraste thermodynamique différent dans les régions océaniques adjacentes, les éclairs produits dans l’océan peuvent servir d’indicateur des effets des aérosols. Ces travaux ont révélé une augmentation de la densité moyenne des éclairs (de 3,7 fois), de la densité des éclairs intra-nuage (de 5 fois), de la densité des coups de foudre nuage-sol (de 2,5 fois), de la densité des éclairs positifs à la fois intra-nuage (de 6 fois) et nuage-sol (de 14,7 fois) pour la région polluée par rapport à la région non polluée17.

Les résultats de l’étude de Pinto Neto et al.12 pendant le confinement au Brésil confirment donc les travaux antérieurs où l’on considère que l’incidence de la foudre est liée de manière non linéaire à la concentration et au type de contamination.

Influence du confinement sur l’incidence de la foudre dans la vallée du Pô

La vallée du Pô est une région très industrialisée du nord de l’Italie qui connaît une forte activité de la foudre en raison de certaines caractéristiques météorologiques (proximité des montagnes, flux d’humidité provenant de la mer Adriatique, convergence des masses d’air froid et chaud). De plus, dans cette vallée, les conditions de ventilation sont rares et, avec la basse température, favorisent la permanence des aérosols pendant de longues périodes11.

Le confinement décrété en Italie pour la pandémie COVID-19 a été prolongé du 9 mars au 18 mai 2020, bien que cela ait été suivi d’une longue période de désescalade des mesures. Il en a résulté une réduction drastique de l’activité industrielle, du trafic et du transport ferroviaire, ce qui a entraîné une diminution de la concentration de PM2,5 et d’autres polluants11.

Cette période de confinement et de désescalade a coïncidé avec une diminution de 70 % de l’activité de la foudre, ainsi qu’une baisse de 15 % de la concentration de PM2,5 les jours d’orage, par rapport à la moyenne climatologique de la vallée 2017-2020.

Les auteurs du rapport ont tenu compte des changements météorologiques qui influencent également la concentration des aérosols, mais qui sont indépendants du confinement. Ils ont donc utilisé trois paramétrisations de la foudre, basées sur la météorologie afin d’estimer l’effet d’une concentration réduite de PM2,5 sur l’activité de la foudre. Les calculs ont montré qu’environ 64% de la diminution de coups de foudre pouvait être attribuée à la météorologie, tandis qu’environ 36% provenait de la réduction des émissions d’aérosols11.

L’étude du Brésil et celle de l’Italie confirment la théorie selon laquelle les aérosols anthropiques ont un impact sur l’activité de la foudre. Les résultats de ces études sont très intéressants à appliquer pour optimiser la prédiction de la foudre selon les modèles climatiques globaux12 et la prédiction des incendies forestiers causés par la foudre 11,18.

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Références

  1. Naccarato, K. P., Pinto Jr., O. & Pinto, I. R. C. A. Evidence of thermal and aerosol effects on the cloud-to-ground lightning density and polarity over large urban areas of Southeastern Brazil. Geophys. Res. Lett. 30, 1674 (2003).
  2. Mushtaq, F., Nee Lala, M. G. & Anand, A. Spatio-temporal variability of lightning activity over J&K region and its relationship with topography, vegetation cover, and absorbing aerosol index (AAI). Journal of Atmospheric and Solar-Terrestrial Physics vol. 179 (Elsevier Ltd, 2018).
  3. Bell, T. L. et al. Midweek increase in U.S. summer rain and storm heights suggests air pollution invigorates rainstorms. J. Geophys. Res. 113, (2008).
  4. Williams, E. & Stanfill, S. The physical origin of the land–ocean contrast in lightning activity. Comptes Rendus Phys. 3, 1277–1292 (2002).
  5. Orville, R. E. et al. Enhancement of cloud-to-ground lightning over Houston, Texas. Geophys. Res. Lett. 28, 2597–2600 (2001).
  6. Farias, W. R. G., Pinto, O., Naccarato, K. P. & Pinto, I. R. C. A. Anomalous lightning activity over the Metropolitan Region of São Paulo due to urban effects. Atmos. Res. 91, 485–490 (2009).
  7. Tao, W.-K., Chen, J.-P., Li, Z., Wang, C. & Zhang, C. Impact of aerosols on convective clouds and precipitation. Rev. Geophys. 50, RG2001 (2012).
  8. Mansell, E. R. & Ziegler, C. L. Aerosol Effects on Simulated Storm Electrification and Precipitation in a Two-Moment Bulk Microphysics Model. J. Atmos. Sci. 70, 2032–2050 (2013).
  9. Tan, Y. B., Peng, L., Shi, Z. & Chen, H. R. Lightning flash density in relation to aerosol over Nanjing (China). Atmos. Res. 174175, 1–8 (2016).
  10. Shi, Z., Wang, H., Tan, Y., Li, L. & Li, C. Influence of aerosols on lightning activities in central eastern parts of China. Atmos. Sci. Lett. 21, (2020).
  11. Pérez-Invernón, F. J., Huntrieser, H., Gordillo-Vázquez, F. J. & Soler, S. Influence of the COVID-19 lockdown on lightning activity in the Po Valley. Atmos. Res. 263, (2021).
  12. Pinto Neto, O., Pinto, I. R. C. A. & Pinto, O. Lightning during the COVID-19 pandemic in Brazil. J. Atmos. Solar-Terrestrial Phys. 211, 105463 (2020).
  13. Cameletti, M. The Effect of Corona Virus Lockdown on Air Pollution: Evidence from the City of Brescia in Lombardia Region (Italy). Atmos. Environ. 239, 117794 (2020).
  14. Lolli, S., Chen, Y.-C., Wang, S.-H. & Vivone, G. Impact of meteorological conditions and air pollution on COVID-19 pandemic transmission in Italy. Sci. Rep. 10, (2020).
  15. Zoran, M. A., Savastru, R. S., Savastru, D. M. & Tautan, M. N. Assessing the relationship between surface levels of PM2.5 and PM10 particulate matter impact on COVID-19 in Milan, Italy. Sci. Total Environ. 738, (2020).
  16. Jones, C. D. et al. The Climate Response to Emissions Reductions Due to COVID-19: Initial Results From CovidMIP. Geophys. Res. Lett. 48, (2021).
  17. Liu, Y. et al. Aerosol Effects on Lightning Characteristics: A Comparison of Polluted and Clean Regimes. Geophys. Res. Lett. 47, e2019GL086825 (2020).
  18. Pérez-Invernón, F. J. et al. Lightning-ignited wildfires and long-continuing-current lightning in the Mediterranean Basin: Preferential meteorological conditions. Atmos. Chem. Phys. (2021) doi:10.5194/acp-2021-125.

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